Table des matières de "Autour de l'intimité"
- Contre cette porcherie dans laquelle on voudrait nous faire entrer... - par Christian GODIN (extraits d’un article paru dans revue électronique Marianne)
- La liberté reste secrète - par Cathy GORYAN
- Discussions et digressions à propos de l’intimité des familles : Texte à deux voix - par Anne GRISARD et Dominique VATELLI
- Internet : un outil génial… si on y est préparé - par Pascal MINOTTE
- Le temps de l’intimité - par Nathalie NOTTET
- Le respect de l'intimité des familles est-il inconciliable avec le respect des principes du procès équitable et de l’intérêt supérieur de l’enfant ? Le point de vue d’un avocat - par Nicolas ALAIMO
- Intimité retrouvée - par Frédérique LIENART
- Le cahier bleu - par Michel HARCQ
- Histoire intime - par Nathalie NOTTET
- L’intime - par Guy DENIS
- Les derniers moments - par Frédérique LIENART
- « Travail social » et « respect de la vie privée », deux notions incompatibles ? - par Antoine MARCHAL
- L’exhibition de l’intimité et le mythe de la transparence - par Alain LEBORGNE
- « De loin en lien : rencontrer les familles d’adolescents placés » - par Isabelle THYS et Anne-Pascale MARQUEBREUCQ
- Ados : la fin de l’innocence. Enquête sur une sexualité à la dérive de Géraldine LEVASSEUR - par Dominique JORTAY
Le respect de l'intimité des familles est-il inconciliable avec le respect des principes du procès équitable et de l’intérêt supérieur de l’enfant ?
Le point de vue d’un avocat
Préserver l’intimité des familles, il est vrai que tel est rarement la préoccupation principale de l’avocat lorsqu’il défend ses clients, mineurs ou parents, dans le cadre général de l’aide à la jeunesse.
En effet, la mission de l’avocat est de conseiller, concilier et de défendre. Cette mission s'accommode mal de la réserve d'informations nécessaires au respect de l'intimité des familles.
L’avocat du mineur et du majeur ont-ils le même rôle ?
Prenons peut-être quelques lignes pour rappeler que cette mission qui implique nécessairement d’être le porte-parole de son client est la même à l’égard d’un majeur que d’un mineur.
Si certains ont déjà soutenu que l’avocat du mineur pouvait s’écarter de la parole de son client dans son intérêt supérieur, cette position ne peut plus aujourd'hui être suivie.
La Cour Européenne des Droits de l’Homme s’est prononcée à différentes reprises et de manière très claire sur cette question (Cour Eur. D.H., 16 décembre 1999, V.C. Royaume-Uni, § 90, Cour Eur. D.H., 15 juin 2004, S.C. c/ Royaume-Uni, § 27) : L’avocat du mineur doit être son porte-parole et c’est le mineur qui a la direction de sa défense dans le procès qui le concerne (A. DE TERWARGNE, "Le mandat de l'avocat du mineur : Porte parole, défenseur, tuteur ou gadget de bon aloi? Eléments de réflexion." in Vade Mecum Jeunesse du Barreau de Bruxelles, éd. 2008).
Il est évident que l’avocat s’adaptera toutefois aux caractéristiques de son jeune client en termes d’écoute et de pédagogie.
Les conflits de valeurs
Cette parenthèse refermée, revenons sur cette tension entre, d’une part, le respect de la vie privée des familles et du secret professionnel des intervenants et, d’autre part, ces principes qui sous-tendent toutes procédures judiciaires que sont le droit à un procès équitable et le respect des droits de la défense.
Ces principes juridiques s’appuient tous sur des bases légales fondamentales, ainsi :
Le respect à la vie privée et familiale est reconnu par l’article 22 de la Constitution belge, par l’article 6 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant et par l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Le droit à un procès équitable est reconnu par l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et implique le respect des droits de la défense.
Le secret professionnel des intervenants est prévu dans l’article 12 du Code de Déontologie de l’aide à la jeunesse édicté par la Fédération Wallonie Bruxelles et à l'article 458 du Code Pénal. Les intervenants ne pourraient recueillir les confidences nécessaires à un travail psychosocial de qualité qu'en garantissant aux familles que seules les informations que la Loi ou leur déontologie les autorisent à transmettre seront transmises.
L’article 458 bis du Code Pénal remet toutefois en cause le caractère absolu du secret professionnel dans la mesure où il prévoit que le dépositaire du secret professionnel peut le briser, s'il à connaissance d’un danger grave et imminent pour l’intégrité physique ou mentale d’un mineur ou d’une personne en situation de faiblesse.
Comme l'exprime bien l'article 458 bis du Code pénal, tous ces principes ne sont pas absolus et s’opposent continuellement l’un l’autre.
Il appartient au praticien de déterminer comment peut se nouer un équilibre satisfaisant entre tous ces droits fondamentaux dans chaque situation particulière qu’il a à connaitre.
Dans le cadre de l'aide à la jeunesse, les différents législateurs ont toutefois tracé une ligne conductrice qui permet de résoudre bon nombre de ces conflits.